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26 février 2025
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Lausanne impose le 30 km/h entre 22 heures et 6 heures sur tous ses grands axes.

30 km/h: le constat est positif

En Suisse, en Belgique, en Espagne ou en Italie, de plus en plus de villes introduisent le 30 km/h. Les motifs, comme les objectifs, varient. Si un aspect domine souvent, plusieurs problèmes disparaissent ensuite d’eux-mêmes. Petit voyage dans cinq villes.

Moins de bruit à Fribourg

Le bruit est source de stress et rend malade; il est nocif, même lorsqu’il est inférieur aux valeurs limites. Environ un million de personnes souffrent du bruit du trafic à leur domicile, en Suisse. En 2019, les nuisances sonores causées par le trafic ont entraîné des coûts externes d’environ deux milliards de francs. La Ville de Fribourg a pris ce problème au sérieux et, à l’automne 2023, a introduit la limitation à 30 km/h dans 60 % de ses rues. Associée à douze kilomètres de revêtement phonoabsorbant, cette mesure a permis de diviser par deux le nombre de personnes subissant des nuisances sonores supérieures aux valeurs limites. Après son introduction, deux pétitions ont demandé son extension et une voulait supprimer la limitation de vitesse à 30 km/h – deux tiers des signataires de cette dernière n’habitant pas à Fribourg. Cela coïncide avec les impressions du conseiller communal Pierre-Olivier Nobs: «Il apparaît que les gens qui habitent en ville de Fribourg sont satisfaits – contrairement à ceux qui habitent dans les quartiers périphériques.»

Nobs souligne également les possibilités supplémentaires: «Grâce au 30 km/h, le réaménagement de la partie inférieure du Passage du Cardinal et la création de la nouvelle place ‹Liselotte Spreng› ainsi que la plantation de 16 arbres aux Arsenaux ont été possibles. Les effets positifs sont inversement proportionnels aux très faibles coûts d’investissement pour les panneaux routiers, le marquage et la communication.»

Douces nuits lausannoises 

Un bon sommeil assure de bonnes journées. Ce que beaucoup ignorent, c’est que nos oreilles ne dorment jamais. Le bruit est source de stress pour notre organisme, même s’il ne nous réveille pas. Ainsi, les personnes exposées au bruit urbain durant la nuit souffrent plus souvent de troubles du sommeil, d’hypertension, de maladies cardiovasculaires et de dépression. Depuis septembre 2021, la ville de Lausanne impose le 30 km/h entre 22 heures et 6 heures sur tous ses grands axes (sauf les routes d’accès de l’autoroute au centreville). Elle est ainsi la première ville de Suisse à avoir franchi le pas. Des projets pilotes préalables ont confirmé l’efficacité de cette mesure; la diminution du bruit mesurée correspondait à une baisse du trafic de 50 %, et même de 80 % eu égard aux pics de bruit particulièrement problématiques. Le 30 km/h a donc un double effet bénéfique sur le sommeil. À Lausanne, près de 33 000 personnes dorment mieux!

Ce n’est pas tout: grâce à cette réduction de vitesse et à environ 40 feux de circulation en mode de «clignotement nocturne», la ville peut s’enorgueillir d’un trafic plus fluide et d’une baisse de la consommation de carburant.

Bruxelles encourage le vélo

Début 2021, la ville de Bruxelles a elle aussi décidé que le 30 km/h serait la règle dans l’ensemble de sa zone urbaine. Le résultat? En six mois, le nombre de décès dus au trafic a reculé de plus de 50 % et celui de blessés graves de 20 %. Cette sécurité objective a également été ressentie sur le plan subjectif: durant la même période, le nombre de cyclistes a augmenté de plus de 20 %.

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Début 2021, la ville de Bruxelles a elle aussi décidé que le 30 km/h serait la règle dans l’ensemble de sa zone urbaine.

Elke van den Brandt, alors ministre de la Mobilité, s’est elle aussi déclarée satisfaite: «Les gens ont vu que circuler à vélo en ville est possible. Par le passé, de nombreuses personnes trouvaient ce mode de transport trop dangereux. Ce n’est plus le cas, et de plus en plus d’enfants roulent également à vélo. C’est très prometteur.» De plus, la ville a développé le plan d’infrastructure «Good Move», qui vise à encourager les déplacements à pied et à vélo pour une vie plus saine. Ce qui est utile aux individus l’est aussi à l’économie. Grâce au recours plus marqué au vélo, Bruxelles s’attend à économiser en moyenne 1400 euros par habitant·e sur le traitement des maladies respiratoires. Autre aspect qui a pu paraître surprenant, les temps de trajets totaux n’ont pas augmenté, comme l’ont montré des estimations après l’introduction du 30 km/h.

Dans un entretien avec l’association cycliste allemande «Allgemeiner Deutscher Fahrrad-Club», Elke van den Brandt expliquait: «Trois quarts de la population étaient pour le 30 km/h et un quart, contre. Cette limitation de vitesse a vite été acceptée, car l’économie en profite clairement et le trafic est devenu plus fluide, car il y a moins de bouchons.»

Bilbao à pied

Avec ses 347 000 habitantes et habitants, Bilbao a été la première grande ville d’Espagne à introduire le 30 km/h à large échelle en septembre 2020, après l’avoir appliqué à 87 % de ses routes depuis l’été 2018. L’effet de ces 13 % ne s’est pas fait attendre: en l’espace d’un an, le nombre d’accidents de la route a diminué de 22,9 %. Durant la même période, la pollution atmosphérique a elle aussi connu un net recul.

Toutes les fractions au Conseil communal se sont accordées sur un calendrier de mobilité urbaine durable d’ici à 2030. Cet engagement rend la ville attrayante pour les piétonnes et les piétons; les trottoirs sont plus larges et le trafic automobile domine moins. Le recours à la voiture n’y est que de 11 %, le taux le plus bas des grandes villes espagnoles. 60 % de tous les trajets s’y font à pied.

Bilbao est considérée comme la «ville des petites distances»: «Nous aimons vivre, travailler et passer notre temps libre au même endroit», explique Neli Santos, conseillère en mobilité et environnement au Conseil municipal. Les craintes des commerces se sont révélées infondées. Des analyses ont montré que la livraison de marchandises ne souffrait pas du nouveau concept de circulation. En effet, le nombre de commandes livrées par heure n’a pas changé et les bus publics arrivaient même plus vite à destination qu’auparavant.

La ville a mené des sondages auprès de la population. Les résultats ont révélé qu’après un certain temps, même les parties prenantes qui avaient commencé par s’opposer à ces mesures, par exemple du côté des commerces, des services de livraison et de taxis, étaient convaincues des bienfaits de cette nouvelle réglementation.

L’Espagne suit le mouvement 

Le 11 mai, l’Espagne a décidé que le 30 km/h serait la règle dans toutes ses villes. Elle est le premier pays d’Europe à franchir ce pas. Les autorités souhaitent rendre les villes plus humaines, et en faire des endroits où l’ensemble des usagères et usagers de la route peuvent cohabiter en toute sécurité. Presque personne n’a protesté.

Flâner à Bologne

En 2023, Bologne a été la première grande ville italienne à appliquer partout le 30 km/h, à l’exception des voies rapides. Depuis 2024, rouler plus vite est amendable. La capitale d’Émilie-Romagne vise ainsi la mobilité durable, plus de sécurité et une meilleure qualité de vie. Et pas uniquement dans ses jolies zones piétonnes ou dans son centre historique, mais aussi pour ses 40 000 habitantes et habitants. «À Bologne, nous allons rouler plus lentement pour plus de sécurité», écrivait ainsi le maire Matteo Lepore dans une lettre adressée à la ville.

«30logna» comporte diverses mesures d’accompagnement, comme un plus grand nombre d’intersections, un rétrécissement des chaussées et un système de stationnement ou la création d’îlots de verdure. Des campagnes de communication et des améliorations systématiques de la planification urbaine ont également eu lieu.

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En 2023, Bologne a été la première grande ville italienne à appliquer partout le 30 km/h, à l’exception des voies rapides.

En janvier 2025, un an après l’adoption des diverses mesures, la ville a publié ses observations. Pour la première fois depuis les premiers relevés il y a 30 ans, personne n’a perdu la vie en marchant dans les rues de Bologne ou en traversant la route. Entre 2014 et 2023, six piétonnes ou piétons en moyenne sont morts chaque année. Le nombre d’accidents impliquant des piétonnes ou des piétons a reculé de 16 %. Au total, le nombre d’accidents mortels a été divisé par deux. Cette performance est d’autant plus remarquable sachant que le nombre d’accidents graves a augmenté dans le reste du pays durant la même période.

Parallèlement, une part de plus en plus importante de la population bolognaise renonce à la voiture au profit des transports publics ou du vélo.