
Première attaque déjouée
La loi sur la protection de l’environnement exige que la population soit protégée contre le bruit de la circulation routière. À cette fin, la vitesse doit être abaissée de 50 à 30 km/h sur les routes principales très fréquentées et de 80 à 60 km/h hors des localités. Ces derniers mois, cet acquis a subi les attaques de l’UDC, du PLR et du Centre. Elles sont pour l’instant restées vaines.
La question à résoudre était technique: où faut-il mesurer le bruit dans un appartement pour s’assurer que les prescriptions en matière de protection contre le bruit sont respectées? D’habiles architectes ont proposé d’autoriser la construction de logements si la salle de bain et la cuisine, plutôt que la chambre à coucher, sont placées du côté de la route bruyante. Les autorités et les tribunaux n’étant pas parvenus à se mettre d’accord sur la légalité de cette pratique, c’est la politique qui, comme souvent, a dû trancher. Cette astuce sans conséquences directes sur le trafic automobile s’est muée en débat fondamental: faut-il pouvoir rouler le plus vite possible ou protéger la population?
Pas de mise sous tutelle
Tandis que dans les quartiers, la limitation à 30 km/h ou les zones de rencontre (20 km/h) peuvent être réalisées sans bureaucratie excessive, la modération du trafic sur les routes principales n’est possible que s’il est avéré que le bruit du trafic nuit à la santé ou, alors, que la sécurité ou le flux du trafic l’exigent. Cette solution n’était pas au goût du président UDC de l’ACS: il a profité du débat sur les fenêtres de salle de bain pour proposer qu’on ne puisse plus du tout exiger de réduire la vitesse sur les routes principales à moins de 50 km/h dans les localités ou à moins de 80 km/h hors des localités pour protéger les riveraines et les riverains du bruit. Les dispositions de la loi sur les routes cantonales et les décisions d’une assemblée communale ou d’un tribunal ne seraient plus valables, quel que soit le volume sonore. L’an dernier, l’UDC demandait déjà que les limitations de vitesse sur les routes principales soient l’apanage de Berne.
La grande majorité des conseillères nationales et des conseillers nationaux du Centre et du PLR a soutenu le projet avant que les parlementaires UDC du conseil des États n’interviennent. La situation est ironique, puisque l’UDC avait récolté des signatures pour des initiatives populaires locales: là où le parti n’avait aucune chance devant les tribunaux dans sa lutte pour des vitesses plus élevées en ville, il demandait à la population de l’aider à combattre la limitation à 30 km/h sur les routes principales. Avec sa campagne pour les élections au Conseil national de 2023, le camp bourgeois a retourné la situation: au lieu de miser sur la résistance locale, il s’agit désormais d’appuyer sur l’accélérateur sous la coupole fédérale dans le débat sur le droit à la protection contre le bruit exigé par la Confédération.
L’ATE a dû brandir la menace – efficace – d’un référendum pour les en dissuader. Les villes et les communes l’ont soutenue, car elles ne voulaient pas se laisser déposséder de leur pouvoir d’épargner des nuits blanches à la population.
L’attaque suivante n’a pas tardé
Ignorant cette tentative ratée, un conseiller national libéral (et membre du comité de direction du TCS) a proposé de restreindre les limitations à 30 km/h (au lieu de 50) sur les tronçons de routes principales. Lisez à ce sujet notre article aux pages 20 et 21. Heureusement, cette ivresse de la vitesse épargne les quartiers: dans ceux-ci, les zones à 30 km/h sont désormais une évidence, tant à la campagne qu’en ville. Cet acquis est le fruit du contre-projet à l’initiative de l’ATE «Routes pour tous» lancée il y a 25 ans.