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4 novembre 2024
St. Gallen Non aux projets autoroutiers extrêmes
Manuel Lopez

Un peu de mathématiques

Les questions politiques – celles relatives aux votations en particulier – sont presque toujours aussi des questions financières. Mais dans quelle mesure les coûts annoncés sont-ils corrects, notamment dans le cas des autoroutes?

Par Nelly Jaggi

Il s’agit d’une ruse de marketing fort répandue: avec la perspective d’un avantage (financier), la clientèle se laisse plus facilement convaincre de l’achat d’un produit. De telles astuces fonctionnent aussi en politique. Ainsi, l’Office fédéral des routes (OFROU) a comptabilisé, pour l’année dernière, près de 48 000 heures d’embouteillage sur les autoroutes, soit le temps durant lequel les personnes qui se déplacent pour le travail ou pour leurs loisirs sont condamnées à patienter derrière leur volant jusqu’à ce qu’elles puissent avancer quelques mètres de plus. À partir de cela, l’OFROU calcule le coût des embouteillages. Un coût d’une nature très théorique, il est vrai, car l’heure perdue par une peintre en bâtiment a sans doute une autre valeur que celle perdue par un excursionniste revenant des montagnes. L’OFROU conjecture qu’une extension des autoroutes réduira les embouteillages, et qu’il en résultera un bénéfice économique annuel de 184 millions de francs.

Cependant, le calcul du coût des embouteillages se fonde sur des chiffres qui ne sont plus d’actualité. Même le secteur routier estime qu’ils sont périmés et a donc défini de nouvelles valeurs, plus précises. Les chiffres actualisés montrent eux aussi que des autoroutes plus larges déboucheraient sur un bénéfice économique, mais un bénéfice amputé de deux tiers... Cela, visiblement, déplaît à l’OFROU, qui continue à baser ses calculs sur les valeurs de 2009. À la fin de l’été, l’hebdomadaire «NZZ am Sonntag» a voulu savoir si et quand l’OFROU changerait sa pratique. Pas pour l’instant, a répondu le département, arguant que les nouvelles valeurs sont encore en discussion au sein de la branche et qu’elles seront introduites lorsque ce débat sera terminé, mais de toute façon après la votation sur l’extension des autoroutes.

Le trafic routier coûte davantage!

Les transports génèrent également des coûts externes élevés, soit les dépenses qu’ils occasionnent mais ne couvrent pas. Il s’agit, par exemple, des coûts de santé dus au bruit ou à la pollution de l’air, des pertes de production dues aux accidents ou des dommages indirects des émissions de CO2. En 2021, la facture de ces coûts externes s’élevait à quelque 11 milliards. Or, on vient d’apprendre que ce calcul-là aussi est dépassé. Il se fonde sur des résultats datant des années 2000. Il existe bien des chiffres plus récents, mais le DETEC, sous la houlette d’Albert Rösti, a tenté de les dissimuler. Ils ont toutefois fuité.

Le coût des dommages en matière de CO2 est désormais indiqué à 430 francs par tonne. Il convient de souligner que même l’Office fédéral du développement territorial le qualifie de «at least approach», c’est-àdire d’estimation prudente. Les coûts climatiques réels seront donc très probablement beaucoup plus élevés. L’impact du bruit – qui a été calculé selon l’ancienne méthode – devrait, selon les nouvelles connaissances, faire encore augmenter les coûts.

Une correction est nécessaire

Au lieu des 11 milliards de 2021, les coûts externes s’élèvent actuellement à plus de 17 milliards. Ils ont donc augmenté de plus de 60 %. Cela a également des répercussions importantes sur l’analyse coûts-bénéfices des projets autoroutiers soumis en votation le 24 novembre. Le Conseil fédéral et le Parlement présentent au peuple des chiffres dépassés et fortement enjolivés comme base de décision sur l’extension des autoroutes. Il en résulte des données fortement enjolivées. Il faut absolument une analyse coûts-avantages révisée sur la base des données actuelles.