Nyon-Le Vengeron : des conséquences délétères pour les villes et les villages
L’ATE a confié au Professeur de la HEIG-VD Yves Delacrétaz, ancien chef de la planification de la Direction générale de la mobilité du canton de Vaud (2002-2005) et directeur général de l'Office des transports du canton de Genève (2005-2011), le mandat d’étudier les conséquences de l’élargissement de l’autoroute entre Nyon et Le Vengeron sur les villes et localités. L’étude du Professeur Yves Delacrétaz publiée aujourd’hui confirme que l’augmentation de la capacité de l’A1 induira d’importantes charges de trafic supplémentaires dans les zones urbaines et viendra annihiler les efforts accomplis ces dernières années pour y réduire le volume du trafic motorisé et inciter au report modal.
Les politiques de mobilités élaborées par les autorités locales menacées par le trafic induit
“Accroître la capacité d’une autoroute à l’intérieur d’une région urbaine telle que l’arc lémanique constitue un puissant levier d’induction du trafic automobile” alerte l'expert. Le volume du trafic stagne, voire diminue depuis une dizaine d’années, malgré la croissance démographique de la région et son développement économique. Une tendance qui devrait s’accentuer suite à l’adoption des plans climats cantonaux et de la loi pour le climat, et qui rend d’autant plus caduque l’intérêt d’une troisième voie.
Pour David Raedler, coprésident de l’ATE Suisse, “contrairement à ce que qu'affirment nos adversaires, élargir l'autoroute aura aussi des conséquences négatives sur le trafic dans les villages et villes. Il est temps de rétablir la vérité”
L’augmentation de la capacité de l’A1 entraînera une augmentation du volume de trafic en direction des grands centres d’emplois que sont Genève et son agglomération (Vernier, Meyrin, Lancy, Plan-les-Ouates, Carouge) d’un côté, Nyon, Morges, l’Ouest lausannois et Lausanne de l’autre. Or, toutes ces villes sont déjà aujourd’hui confrontées à des problématiques concrètes en la matière. Lesquelles les ont conduites à mettre en œuvre des politiques de mobilité axées sur une diminution des flux automobiles, afin de libérer de l’espace urbain pour les transports publics, les cyclistes et les piétons, lutter contre le bruit routier et la pollution.
C’est sur ces incohérences manifestes que se penche l’étude d’Yves Delacrétaz en détaillant les conséquences pour Genève, la région de Coppet et celle de Nyon à partir des données du rapport technique de l’OFROU.
Des impacts marqués pour Genève, Nyon et les villages de la région
Concernant Genève, l’étude montre que l’élargissement du tronçon Nyon-Le Vengeron est incompatible avec les objectifs de la politique de mobilité du canton, définis dans la Loi sur la mobilité cohérente et équilibrée (LMCE) afin de soulager Genève et les communes suburbaines du trafic routier qui les étouffe. Dans son étude, Yves Delacrétaz souligne que la volonté du canton de reporter le trafic du centre vers l'autoroute de contournement ne pourra être réalisée, car le volume de trafic supplémentaire provenant du canton de Vaud saturera l’autoroute de contournement.
Pour la jonction de Coppet, Yves Delacrétaz analyse que les charges de trafic supplémentaire dues à l’élargissement de l’autoroute seront dommageables pour les communes situées du côté Lac de la jonction, soit Commugny, Tannay, Mies et Coppet qui subiront de très fortes nuisances supplémentaires. La pression du trafic sera particulièrement prégnante sur la route de Divonne qui pourrait ne pas pouvoir être maintenue dans son aménagement actuel.
Pour la jonction de Nyon, l’étude indique qu’on pourrait s’attendre à des volumes de trafic de 25% à 50% plus élevés sur la Route Blanche, à la sortie de la jonction de Nyon. Ces volumes généreront d’importantes nuisances dans les quartiers d’habitations et pénaliseront les autres modes de transports. Ceci contrecarre les progrès accomplis ces dernières années sur le territoire nyonnais (comptages routiers et taux de motorisation en baisse) et rentre en contradiction avec les décisions de la Ville de Nyon et du Conseil d’Etat vaudois de ne pas accroître la capacité du réseau routier cantonal et communal (ex. abandon de la RDU et suspension du projet d’élargissement de la Route Blanche) et de miser sur le report modal pour résoudre les problèmes de mobilité.
Un élargissement autoroutier inutile et déphasé par rapport aux évolutions actuelles et futures du trafic
L’étude souligne donc à quel point l’élargissement de l’A1 contrecarre les objectifs de ces politiques de mobilité, mais également les objectifs de report modal et de neutralité carbone des Plans climats cantonaux.
L’étude met en exergue que de manière globale dans la région, les flux automobiles ne s’accroissent plus depuis au moins une dizaine d’années. Ceci s’observe dans les villes, mais également sur la RC1/Route Suisse (baisse du trafic journalier de 40% en 17 ans), aux frontières du canton de Genève, mais aussi sur différentes routes cantonales de Terre-Sainte. Ces résultats montrent que l’hypothèse selon laquelle les communes riveraines de l’autoroute seront étouffées par un trafic d’évitement en cas de NON le 24 novembre ne se vérifie pas dans les tendances actuelles et futures. Les flux automobiles n’augmentent plus. Cette tendance générale est aussi relevée par les 350 experts en mobilité dans leur lettre ouverte récemment publiée qui évoque une baisse du trafic dès 2030. Une réalité qui serait bouleversée par l’élargissement autoroutier dont la première conséquence serait d’inverser cette dynamique et d’augmenter les flux de voitures.