Challenge: Vivre sans voiture
Dans plusieurs régions de Suisse, des automobilistes relèvent le défi de se passer de leur voiture durant une période définie afin d’explorer une mobilité plus durable. Exemple à Lucerne, au Jura et dans la Broye.
«Dry January», «Veganuary», «Février sans supermarché», «Movember»… On ne compte plus le nombre de défis qui nous mobilisent tout au long de l’année. Abandonner une habitude ou en adopter une nouvelle sur une durée déterminée contribue à faire évoluer nos comportements. Un mois sans viande, sans tabac, sans alcool ou, pourquoi pas, sans voiture?
À leur modeste échelle, les gestes individuels peuvent contribuer à lutter contre le changement climatique. Mais il manque parfois le déclic qui nous fait tester une alimentation moins carnée ou une mobilité plus durable. Prendre part à un défi permet de dépasser cette barrière en cultivant un esprit ludique et un sentiment de communauté – et d’aboutir à des résultats probants.
Accompagner le changement
Dans le canton de Lucerne, le Luzernmobil-Challenge était organisé pour la deuxième fois au mois de mai. Cinquante personnes ont accepté de renoncer à leur voiture privée pour vivre un nouveau quotidien à vélo, en transports publics et à pied. Pour Sarah Troxler, coordinatrice du projet, le challenge permet de motiver les gens à changer leurs habitudes en les y accompagnant: «S’informer sur les alternatives à la voiture demande beaucoup d’efforts. Grâce aux packs de mobilité proposés, nous facilitons la participation. » Les volontaires avaient ainsi la possibilité de bénéficier d’un abonnement demi-tarif aux transports publics, d’un vélo électrique ou cargo-bike, d’un bon pour des voitures partagées ou encore de bon à faire valoir dans un espace de coworking.
Le défi n’est pas réservé aux régions urbaines. Dans la Broye et au Jura, une initiative similaire a été lancée afin de mettre à l’épreuve la réalité d’un terrain moins bien desservi par les transports publics et parfois moins cyclable. «Cette action avait également pour objectif de tirer des enseignements provenant directement de l’expérience des utilisateur·ices afin de travailler sur des améliorations concrètes et les prioriser», explique Thibaud Chevalley, responsable du projet pour la Communauté régionale de la Broye (Coreb). En juin, une quarantaine de Broyard·es ont pris part à cette action.
Au Jura, le «Défi 15 jours sans voiture » a commencé en mai et s’étendra sur une année. Toutes les deux semaines, une nouvelle volée de participant·es dépose les clés de son véhicule pour enfourcher un vélo ou prendre un bus. «L’engouement est très encourageant! Toutes les plages disponibles sont complètes jusqu’à l’automne», se réjouit Christelle Vallat, secrétaire de l’ATE Jura, partenaire du défi.
Et ensuite?
Dans les trois régions, les participant·es soulignent combien le défi leur a permis de réfléchir à leurs habitudes de mobilité. Objectif atteint pour les responsables du challenge lucernois, qui voulaient ainsi mettre en évidence l’éventail des offres alternatives. Au Jura et dans la Broye aussi, les partenariats avec des entreprises de transports publics et des magasins de vélo ont contribué à cette visibilité.
Temps de trajets plus long, météo maussade, mauvaises connexions en transports publics: les surprises ont parfois entravé le quotidien des volontaires. Le plus difficile a souvent été de maintenir ses activités de loisirs et d’assurer les différents trajets des enfants. Afin d’initier un véritable changement, les participant·es attendent davantage de soutien au niveau politique. «L’état ne fait pas assez, ne serait-ce qu’en termes d’impôts. C’est beaucoup plus avantageux d’aller travailler en voiture qu’en transports publics», déplore une participante au défi broyard.
Mais les aspects positifs ont équilibré le bilan et conduit à des décisions durables. À Lucerne, un participant avait déjà renvoyé la plaque d’immatriculation de sa voiture privée à mi-parcours du défi. Deux personnes ont vendu leur voiture et quatre prolongent le challenge pour une durée indéterminée. Dans la Broye, le bilan est majoritairement positif et trois personnes ont prévu de se séparer de la seconde voiture de leur ménage.
Outre les bénéfices environnementaux, ce type de défi rencontre un bel écho médiatique qui permet de mettre la mobilité durable au coeur du débat. Au Jura, le Quotidien Jurassien est d’ailleurs partenaire de l’action et offre aux participant·es un abonnement numérique idéal pour occuper les trajets en transports publics. La portée n’est pas que régionale: le défi broyard a même été relayé dans le journal espagnol El País!