#MobilitéDesSeniors

L’ATE a tenu son premier séminaire sur la mobilité des seniors

Sarah Widmer  19 mai 2023

Les seniors représentent une part croissante de la population mais leurs besoins de mobilité restent souvent négligés. Sur la base de ce constat, l’ATE a organisé un séminaire le jeudi 11 mai, à Lausanne, invitant la cinquantaine de participant·es à prendre la mesure des défis posés par le vieillissement démographique pour la mobilité et l'aménagement des territoires.

Depuis sa création en 1979, l’ATE s’investit pour la mobilité des plus vulnérables. Favoriser la mobilité des personnes âgées constitue donc un aspect central des projets qu’elle développe à ses bureaux de Berne et de Genève. L’ATE a acquis une expertise sur ces questions et propose différentes solutions pour améliorer les déplacements des aîné·es dans l’espace public ou en transports en commun. L’organisation du séminaire du 11 mai répondait à plusieurs objectifs : d’une part, continuer à sensibiliser le politique et les professions de l’aménagement aux problématiques que rencontrent les aîné·es dans leurs déplacements ; d’autre part, leur présenter des solutions pour réduire les obstacles limitant l’autonomie des seniors. 

Ce que ce séminaire nous a appris 

Comment favoriser les mobilités durables et actives des personnes âgées au sein des territoires ? Voici la grande-question qui sous-tendait le séminaire organisé par l’ATE, ce jeudi 11 mai. Cette question a été abordée dans le cadre de 5 présentations, dont les principaux messages à retenir sont résumés ici. 

Raphaël Ancel de l’ARE a posé le cadre, en présentant les données du dernier microrecensement mobilité et transports 2021 du point de vue de la mobilité seniors. En 2021, la part modale du transport individuel motorisé (TIM) a augmenté chez les 65 ans et plus, au détriment des transports publics, dont le recul s’explique par le COVID-19. La part de la marche est restée stable et le vélo a gagné un point de pourcentage par rapport à 2015. Raphaël Ancel a aussi rappelé la vulnérabilité des seniors dans la mobilité : en 2021, les seniors comptent pour 12% des distances parcourues en Suisse, mais pour 37% des décès liés à la mobilité selon le rapport SINUS du BPA. Sa conclusion ? Si d’importants efforts sont nécessaires pour réduire cette forte accidentalité, il faut aussi continuer à promouvoir les modes actifs dont les bénéfices pour la santé des seniors dépassent les coûts liés aux accidents (source : ARE, Coûts et bénéfices externes des transports, 2019). 

Vincent Péclet d’Unisanté (VD) a justement mis l’accent sur les bienfaits de l’activité physique pour la santé et le maintien de la mobilité des seniors. Au-delà de la promotion de comportements plus actifs, il faut aussi créer des conditions-cadres favorisant l’activité physique, telles que la réalisation d’« environnements actifs » ou « favorables à la santé ». Les synergies entre santé publique et aménagement du territoire sont ici visibles… et on espère que les connexions et collaborations entre ces domaines vont se poursuivre à l’avenir. 

Cornelia Hummel, sociologue du vieillissement et professeure à l’Université de Genève, nous a parlé de l’importance de la marche au grand-âge. Avec l’avancement de l’âge, la mobilité et la sociabilité deviennent de plus en plus centrées autour du domicile. La marche (re)devient, alors, une mobilité essentielle : bien plus qu’un déplacement de A à B, marcher permet d’établir des liens sociaux et de maintenir son rapport au monde. Cornelia Hummel nous a rappelé l’importance des commerces de proximité, des bancs et des cheminements piétons sécurisés. Elle a mentionné que les seniors interrogé·es lors de l’une de ses enquêtes associaient le terme « insécurité » non pas à la peur d’une agression, mais à celle de chuter dans l’espace public. Selon elle, les espaces partagés entre vélos et piétons, ainsi que les zones 30 sans passages piétons sont anxiogènes pour les plus âgé·es. 

Joël Meissonnier sociologue des transports et des comportements de déplacement nous a présenté une étude qu’il mène dans la métropole de Lille, en France. Le chercheur nous a parlé d’un moment charnière lié à l’avancée en âge : quand conduire ne devient plus possible. La démotorisation des seniors est une problématique importante car la génération des baby-boomers entre dans le quatrième âge et c’est la première génération à avoir massivement utilisé la voiture tout au long de sa vie. L’attachement de cette génération à l’automobilité est tel que l’arrêt de la conduite est souvent soudain et subi. D’après le chercheur, cette démotorisation serait sûrement mieux vécue si elle était mieux anticipée. Cette anticipation n’incombe pas qu’aux seniors : les pouvoirs publics ont aussi un rôle à jouer. A cet égard, la gratuité des transports publics (introduite, par exemple, à Dunkerque) pourrait favoriser leur utilisation par les aîné·es, en déchargeant ces dernier·ères des soucis liés au coût et à la compréhension de la billettique. Parmi les solutions évoquées par Joël Meissonnier, le fait de « réapprendre » aux seniors à prendre les transports en commun correspond à ce que propose l’ATE avec ses cours « être et rester mobile ». 

Les Plans de Mobilité Seniors de l’ATE comme solution 

La dernière présentation a été donnée conjointement par Jérôme Grand de la Ville de Carouge (GE) et par Alice Genoud, du Bureau romand de l’ATE. La présentation portait sur le Plan de Mobilité Seniors que réalise actuellement l’ATE dans un quartier de Carouge. Jérôme Grand a commencé par présenter la politique « aîné·es » de la Ville de Carouge axée sur le développement de conditions-cadres, plutôt que sur des mesures de soutien ponctuelles. Le choix de réaliser un Plan de Mobilité Seniors (PMSeniors) avec l’ATE s’inscrivait donc pleinement dans cette logique. Alice Genoud a, ensuite, présenté les PMSeniors : une démarche participative qui permet d’identifier les points noirs à améliorer pour la mobilité des seniors dans l’espace public. Pour Alice Genoud, les forces de cette démarche sont la participation des seniors, les mesures de sensibilisation proposées (il ne s’agit pas uniquement de mieux aménager), et les recommandations transmises aux communes qui constituent un véritable outil d’aide à la décision pour l’aménagement d’un territoire communal plus favorable aux seniors. 

Les cinq présentations ont été suivies d’un moment de questions et de discussions avec le public. La question de la billettique, de la disparition des guichets ou de la possibilité d’acheter son titre de transport auprès du conducteur a occupé une partie de la discussion, la fracture numérique touchant encore une part importante de seniors. La gratuité des transports publics (récemment interdite en Suisse par le Tribunal fédéral) est revenue sur le tapis comme solution favorable à la mobilité des seniors. Elle a toutefois également été sujette à caution au vu du report modal de la marche vers les TP (plutôt que du TIM vers les TP) que cette mesure pourrait susciter. D’autres questions ont porté sur comment inciter les seniors à marcher davantage, ou sur comment augmenter leur participation lors de diagnostics de mobilité. 
 

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