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Avancer ensemble

En matière de politique des transports comme de protection de l’environnement, l’engagement est d’autant plus impactant lorsqu’il dépasse les frontières. Avec ses organisations soeurs en Allemagne et en Autriche, au sein de la faitière européenne Transport & Environment, par le travail de ses sections ou lors d’échanges thématiques, l’ATE s’inspire de bonnes pratiques, partage ses succès et construit des ponts.

Au-delà des frontières – intérieures et extérieures

Les personnes qui traversent quotidiennement la frontière suisse pour se rendre au travail le font majoritairement en voiture. Dans le Jura, cette proportion atteint le chiffre record de 97 %. À Genève, la proportion était à un niveau comparable il y a peu, mais l’ouverture du Léman-Express a permis de la réduire de 10 %. Les touristes qui traversent la Suisse pour atteindre leur destination au sud voyagent principalement en voiture. En matière de transit des marchandises à travers les Alpes également, des mesures correctrices s’imposent d’urgence: l’année dernière, 863 000 passages de poids lourds ont été enregistrés alors qu’ils sont censés être plafonnés à 650 000. Ces chiffres illustrent bien que la seule politique des transports nationale ne suffit pas. La recherche de solutions a clairement une dimension internationale.

«À l’époque déjà, il était évident que les problèmes de transports et d’environnement nécessitent une collaboration transfrontalière.»

Mais cela n’est pas nouveau. Au lendemain de la création de l’ATE, ses membres ont agi au plan international en collaborant à la fondation des «ATE» d’Allemagne (VCD) et d’Autriche (VCÖ), et à celle de l’organisation faîtière européenne Transport & Environment (T & E). À l’époque déjà, il était évident que les problèmes de transports et d’environnement nécessitent une collaboration transfrontalière.

Depuis lors, VCD et VCÖ ont évolué dans d’autres directions, sans toutefois se départir de leur objectif d’oeuvrer à «une mobilité durable pour la qualité de vie et l’environnement». Association à ses débuts, le VCÖ s’est mué en un «think tank» financé par des dons. Pour sa part, le VCD a adopté une structure fédéraliste comparable à celle de l’ATE Suisse en externalisant ses prestations et se transformant en une organisation militante. Les trois «ATE» profitent mutuellement de leurs réguliers échanges de vues et d’expériences. Elles s’accordent un accès commun facilité à leur savoir-faire et à leur travail de campagnes, s’évitant ainsi de devoir chaque fois partir de zéro.

À l’échelon européen, il convient de mentionner la Cipra, l’organisation faîtière des ONG actives dans la protection des Alpes, ainsi que T & E. Cette dernière s’est assigné une importante tâche régulatoire. La faîtière s’investit pour que des mesures efficaces soient prises pour atteindre les objectifs de sauvegarde du climat – à l’instar de la décision du Parlement européen de cet été d’interdire dès 2035 la vente des voitures et utilitaires émettant du CO2. Cette décision a été précédée d’un intense travail de lobbying par T & E et ce, plusieurs mois durant.

Cela étant, des frontières existent aussi à l’intérieur de la Suisse, dont les plus connues sont celles des langues. Avec son Bureau romand – son agence en Suisse romande et au Tessin – l’ATE joue ses atouts et transcende les frontières pour atteindre l’objectif commun: une mobilité durable pour la qualité de vie et l’environnement.

Stéphanie Penher - Responsable Politiques des transports et Campagnes

Collaboration pan-européenne

Dans le domaine des transports aériens et ferroviaires internationaux et des objectifs CO2 des voitures neuves, les possibilités de l’ATE sont restreintes. C’est pourquoi elle collabore activement avec le réseau européen de Transport & Environment.

Le plafonnement des émissions de CO2 des voitures neuves, de même que les normes anti-pollution, sont de puissants leviers pour contraindre les constructeurs à rendre leurs voitures «plus propres». Or ces mesures ont été adoptées par l’Union européenne (UE), puis – après adaptation – reprises par la Suisse. C’est ainsi que la plupart des réglementations suisses sur le commerce international voient le jour. Certaines sont adoptées activement par une décision politique, d’autres sont même reprises automatiquement et sans modification.

Un tel mécanisme donne toute son importance à la collaboration de l’ATE avec l’organisation faîtière européenne Transport & Environment (T & E). L’ATE en est membre, aux côtés de 50 autres organisations environnementales d’Europe. Elle y représente la Suisse, conjointement avec l’Initiative des Alpes.

Échange d’informations

«T & E nous tient au courant de l’évolution politique de l’UE, ce qui nous permet d’adapter nos axes thématiques en conséquence», explique Martin Winder, responsable de projets de politique des transports à l’ATE. «En outre, T & E effectue un précieux travail de fond et publie d’utiles études qui font la lumière sur les côtés obscurs du secteur des transports.» C’est en effet T & E qui a révélé que les émissions de CO2 des hybrides rechargeables sont, en conditions réelles, bien plus élevées que les valeurs d’homologation. Depuis lors, l’UE a corrigé son calcul des émissions de CO2 de ces véhicules – entraînant une rectification des valeurs officielles en Suisse également.

La collaboration avec T & E est également essentielle dans le domaine des transports aériens. Par sa campagne «travel smart», elle invite les entreprises à réduire leurs voyages d’affaires et en publie un palmarès basé sur leurs promesses d’amélioration. L’ATE, pour sa part, veille à relayer ces informations dans les médias suisses.

De nombreuses règlementations suisses s’inspirent de ce qui se fait à l’échelle européenne.

Donner des idées

Dans le domaine des transports ferroviaires, la collaboration avec T & E est loin de fonctionner à sens unique. «En Suisse, le train est bien mieux loti que dans nombre de pays d’Europe», relève Stéphanie Penher, qui représente l’ATE au sein du Comité de T & E (voir sur la page de gauche). «Le système de billetterie commun à tous les exploitants du réseau suisse a valeur de modèle.» Conséquemment, T & E s’en est inspiré et fait actuellement campagne pour l’instauration d’un système de billetterie européen uniformisé visant à faciliter les voyages internationaux en train.

Anette Michel - Responsable du projet eco-auto

Carte blanche à nos voisines

La VCÖ en Autriche et la VCD en Allemagne sont des associations soeurs de l’ATE. Elles poursuivent le même objectif: une mobilité durable, centrée sur l’humain et l’environnement. Leurs porte-parole évoquent les sujets qui les occupent actuellement.

VCÖ: Des données, des faits et des réseaux pour des transports durables

Un tournant dans le domaine des transports est primordial pour atteindre les objectifs climatiques, aussi bien en Suisse qu’en Allemagne et en Autriche. L’aggravation de la crise climatique en a accru l’urgence. Depuis sa création en 1988, la VCÖ vise une mobilité écologique et équitable. Ce sujet auparavant marginal est désormais une préoccupation majeure au sein de la société. Attribué chaque année depuis 1992, le «prix VCÖ de la mobilité» est le plus grand concours autrichien consacré à une mobilité respectueuse du climat et au transport durable de marchandises. Son succès souligne combien la thématique est actuelle; d’une centaine de candidatures par an au début des années 2000, on est passé depuis 2015 à plus de trois cents projets soumis. Comme l’explique Ulla Rasmussen, directrice de la VCÖ, «avec notre prix, nous voulons inciter au changement et montrer ce que font déjà des communes, villes, entreprises, écoles, universités et autres initiatives, afin que les transports deviennent compatibles avec le climat». Une base de données publique présenteles projets sur www.vcoe.at, pour motiver et inspirer.

Taxer aussi l’essence et le diesel

Une taxe de 30 euros par tonne de CO2 émise est entrée en vigueur le 1er octobre dernier en Autriche. Contrairement à la taxe suisse sur le CO2, l’autrichienne s’applique aussi à l’essence et au diesel, en plus du mazout et du gaz. Elle passera à 55 euros d’ici 2025.

La VCÖ collabore avec les usagères et usagers des chemins de fer autrichiens pour évaluer le potentiel d’amélioration. Cette année, l’association a interrogé plus de 9300 personnes dans les trains de dix compagnies ferroviaires.

La VCÖ a des échanges étroits avec des scientifiques et spécialistes dans différents domaines. Elle propose des conférences à thème – souvent en ligne depuis la pandémie – et elle participe à des publications spécifiques et fiches d’information (disponibles sur son site web). Ulla Rasmussen rappelle que «la mobilité est un sujet transversal. Le tournant énergétique passe donc par un tournant dans les transports. La construction de logements et l’urbanisation influent aussi sur notre comportement en matière de mobilité. À l’inverse, celle-ci a un impact énorme sur notre santé, négatif par la pollution atmosphérique et sonore, ou positif quand une bonne planification des transports réussie permet de se déplacer plus facilement à pied ou à vélo.» L’internalisation des coûts externes est un autre sujet brûlant pour la VCÖ.

Les projets d’infrastructure ont une incidence sur la mobilité pendant des décennies.

L’introduction de la tarification du CO2 en Autriche, en octobre dernier, représente un pas dans la bonne direction. L’activité de la VCÖ est également axée sur sa participation à des commissions. Elle y défend les intérêts des générations futures. Les projets d’infrastructure ont une forte incidence sur la mobilité, pendant des décennies. «Pour atteindre les objectifs climatiques, il faut impérativement réduire le nombre de voitures et de camions. L’extension des autoroutes appartient donc au passé», souligne Ulla Rasmussen.

La VCÖ publie des graphiques réputés même au-delà de l’Autriche pour leur grande clarté. Ils sont relayés sur les réseaux sociaux, par des spécialistes lors de conférences ainsi que dans des universités et des écoles.

Informations supplémentaires (en allemand; présentation succincte en anglais) sur www.vcoe.at.

Christian Gratzer -  porte-parole de la VCÖ

VCD: Pour des transports respectueux du climat et socialement équitables

Une mobilité respectueuse du climat et socialement équitable: telle est l’une des préoccupations majeures de l’association allemande VCD. De bonnes alternatives à la voiture individuelle sont nécessaires afin que chaque personne puisse se déplacer en toute autonomie et durablement – quels que soient son âge, son genre, son revenu, son lieu de résidence ou ses limitations physiques. À cet égard, la garantie de mobilité est l’instrument clé. Elle favorise l’apparition de normes nationales quant à la qualité des voies piétonnes et cyclables ainsi que des bus et des trains. Elle facilite aussi la création d’offres de mobilité complémentaires.

Trop de personnes restent socialement désavantagées parce qu’elles n’ont pas les moyens de payer un titre de transport, parce qu’elles ne peuvent monter dans un bus avec leur chaise roulante ou tout simplement parce qu’il n’y a pas de bus. Une garantie de mobilité encourage l’offre locale de transports publics, de bonne qualité et accessible. Des billets sociaux aident celles et ceux pour qui le tarif normal est trop élevé.

La concrétisation d’une garantie de mobilité exige des directives et conditions-cadres claires à l’échelon politique. Or, en Allemagne, la législation actuelle en matière de transports manque d’objectifs qui tiennent compte de l’être humain et de la protection du climat. D’autre part, une planification globale fait défaut puisque chaque mode de transport est considéré séparément. Un nouveau cadre juridique doit y remédier. La VCD a donc élaboré une proposition de loi fédérale sur la mobilité, en concertation avec des expert·es issu·es du monde associatif, de la planification urbaine et des transports, de la science, de l’administration et de la politique. Des spécialistes en droit constitutionnel ont reçu le mandat de présenter un projet de loi concret.

La loi fédérale sur la mobilité fixe des objectifs au niveau supérieur: outre la protection du climat, elle doit garantir la mobilité des personnes et des marchandises, la sécurité routière, la protection de la santé, l’efficacité et la résilience. De ces objectifs découlent la planification et le financement des transports. Seules les infrastructures nécessaires à leur réalisation pourraient dès lors voir le jour. Des normes d’accessibilité garantissent par ailleurs une bonne offre de bus et de trains ainsi que des voies piétonnes et cyclables sûres, même dans les petites localités. La pratique suisse a parfois inspiré les constitutionnalistes, car elle fournit des approches intéressantes, surtout en ce qui concerne la planification intégrée des transports, le financement des infrastructures ou le respect des critèresde durabilité.

Sans objectifs de planification contraignants, on ne pourra atteindre ni les objectifs climatiques ni ceux de transfert modal.

La proposition de loi fédérale allemande sur la mobilité a été rendue publique au printemps 2022. Le contenu et les objectifs sont encore discutés par différentes parties prenantes dans la sphère politique et l’administration, aux échelons fédéral, régional et communal, ainsi qu’avec des entreprises de transport. Toutes ces parties admettent depuis longtemps la nécessité de moderniser la législation allemande en matière de transports. Sans objectifs de planification contraignants, on ne pourra atteindre ni les objectifs climatiques ni ceux de transfert modal. La VCD continuera de s’engager politiquement pour concrétiser le tournant dans le domaine des transports.

Informations supplémentaires (en allemand): www.vcd.org/soziale-aspekte-verkehrswende et www.vcd.org/bumog (Loi fédérale allemande sur la mobilité).

Michael Müller-Görnert - porte-parole de la VCD pour la politique des transports

Pourquoi est-ce si compliqué?

L’envie de partir découvrir l’Europe est de retour, mais la planification et la réservation de voyages en train restent liées à nombre d’obstacles.

Les bouchons au Gothard atteignent de nouveaux records, tout comme le nombre de passagères et passagers aux aéroports. Malgré la crise climatique, l’envie de voyager est forte. Les liaisons ferroviaires internationales opèrent aujourd’hui pour certaines à la limite de leurs capacités, alors qu’elles sont essentielles pour atteindre les objectifs climatiques dans le domaine des transports.

De nombreux facteurs, allant du manque de personnel à l’engorgement des infrastructures, mènent le trafic européen de personnes à ses limites. Par ailleurs, les voyages en train sont confrontés à un obstacle supplémentaire: le manque de transparence des structures tarifaires.

La diversité de tarifs et de prestataires fait du trafic ferroviaire européen une vraie jungle.

Esprit de clocher problématique

Un simple permis de conduire suisse suffit pour parcourir le monde. Quelques clics permettent d’obtenir le meilleur tarif pour s’envoler en direction des tropiques. Par contre, le trafic ferroviaire européen ressemble à une vraie jungle en raison de la diversité des tarifs et des prestataires.

Il n’existe pas de système de réservation unifié, et de nombreux prestataires préfèrent se concentrer sur la tarification différenciée, soit la régulation dynamique des prix en fonction de la demande et du moment de l’achat. Le billet est ensuite vendu comme «offre dégriffée», un doux euphémisme pour parler des droits de la clientèle limités.

Renforcer la collaboration

Certes, ce contingentement complexe de divers tarifs pour le même service permet parfois de voyager à (très) bon prix sur certains tronçons, mais il rend aussi la structure tarifaire totalement opaque. On ne peut donc pas en vouloir aux voyageuses et voyageurs de réserver un vol pour s’épargner ce processus pénible. En outre, de nombreux pays européens voient apparaître une concurrence privée aux chemins de fer étatiques. En Italie, italo roule aux côtés de Trenitalia sur certaines lignes à grande vitesse; en Espagne, c’est Renfe qui subit depuis peu la concurrence d’iryo. Et en Allemagne, les flixtrains verts circulent depuis quelques années, y compris jusqu’à la gare badoise de Bâle. Il est vrai que ces entreprises proposent des offres supplémentaires sur certains itinéraires, mais elles compliquent aussi l’entier du système et l’achat de billets.

Le système tarifaire suisse a été unifié en 1857 déjà et, aujourd’hui, presque n’importe quel automate ou application mobile dédiée permet d’acheter un billet pour voyager dans tout le pays. Le succès de notre système de transports publics est entre autres dû à cet accès aisé. L’ATE et la faîtière Transport & Environment exigent depuis longtemps une tarification européenne intégrale afin de simplifier la planification des voyages et l’achat de billets. La Suisse pourra faire profiter ses voisins européens de son expérience et ainsi contribuer à promouvoir les voyages en train au-delà des frontières.

Selim Egloff - responsable de projets Sécurité routière 

Changer le monde, un pas à la fois

Partie intégrante de tous nos déplacements et indicateur de la qualité de vie de nos villes, la marche fait partie du quotidien et mérite d’être remise au centre de la planification urbaine.

La marche est la forme la plus fondamentale de mobilité. Peu coûteuse, elle ne produit pas d’émissions, présente d’importants avantages pour la santé et est accessible à presque tout le monde. Elle reste pourtant un mode de transport négligé, rarement pris en compte dans les statistiques de mobilité et souvent sousévaluée dans la planification urbaine.

En septembre dernier, la conférence internationale «Walk 21» a rassemblé spécialistes, universitaires, politiques, citoyennes et citoyens pour échanger sur le rôle crucial de la marche. La Suisse y était notamment représentée par le Bureau romand de l’ATE, invité à présenter ses campagnes sur les quartiers sans voiture, l’inclusion des personnes âgées, le Pedibus et la mobilité scolaire.

Les infrastructures piétonnes restent insuffisantes dans les quartiers défavorisés et ont un impact direct sur le nombre d’accidents, la marche y étant le mode de déplacement privilégié.

Le rôle des enfants

Du Brésil à l’Albanie et en passant par l’Italie, les projets en matière de mobilité piétonne donnent une importance centrale aux besoins spécifiques des enfants. En Suisse aussi, on considère qu’une rue adaptée aux enfants doit l’être pour toutes et tous, sans limites d’âge. Au-delà de nos frontières, la sécurité routière reste au coeur des réflexions, mais elle est souvent enrichie d’une dimension ludique et artistique qui rend l’espace à la fois plus sûr et plus accueillant pour les habitant·es des quartiers concernés: pavés colorés, espaces de jeu et parcours de 100 mètres remplacent les places de stationnement.

Marche et égalité

Au-delà de l’âge, des critères sociaux et de genre offrent un nouveau prisme d’analyse de la mobilité piétonne. La réalité des femmes dans l’espace public et les enjeux spécifiques (harcèlement mais également déplacement avec une poussette par exemple) sont peu investigués, alors que les femmes sont plus nombreuses à marcher que les hommes. Des études consacrées à l’intersection entre le transport, la santé et l’équité soulignent qu’une meilleure sécurité est souvent un privilège des classes aisées de la population. Les infrastructures piétonnes restent insuffisantes dans les quartiers défavorisés et ont un impact direct sur le nombre d’accidents, la marche y étant le mode de déplacement privilégié.

La conférence «Walk 21» a rappelé que les piéton·nes doivent être le point départ de chaque réflexion d’aménagement. La conférence «Walk 21» a rappelé que les piéton·nes doivent être le point départ de chaque réflexion d’aménagement.

Les piéton·nes au centre

Dans un contexte de densification des villes, cette conférence a rappelé que les piéton·nes doivent être le point départ de chaque réflexion d’aménagement. Gageons que les participant·es de «Walk 21» ramèneront dans leur valise les mots de la mairesse de Tirana (Albanie): «Nous réfléchissons comme si les voitures pouvaient devenir dépressives à cause des ralentisseurs, mais qu’en est-il des êtres humains? Pouvoir marcher n’est-il pas un droit pour toutes et tous?»

Alice Gentile - responsable de projets Sécurité routière

Corine Kibora - responsable du projet Pedibus

Atteindre les cimes en restant sur terre

Le chemin vers un transport aérien respectueux du climat, de l’environnement et de l’être humain est encore long et abrupt. En regroupant ses forces avec celles d’autres organisations au sein de l’alliance Stay Grounded, l’ATE s’équipe de la meilleure des manières pour cette ascension.

Celles et ceux qui s’engagent pour réduireles émissions et le bruit du transport aérien l’ont remarqué: on se casse vite les dents sur des discours politiques et des campagnes de greenwashing bien rodés. Chaque progression relève de l’exploit. Au sommet de ce qui prend des airs de randonnée de haute montagne culmine un objectif: un ciel apaisé pour un avenir viable.

Alliances nationale et internationale

L’ascension de ce long sentier semé d’embûches ne peut se faire qu’en regroupant des forces. C’est ce que font les 28 organisations suisses, dont l’ATE, au sein de la coalition environnement et santépour un transport aérien responsable (CESAR). À coup d’actions politiques etde sensibilisation, ce «camp de base» helvétique travaille à replacer la protectiondu climat et de la population au centre des débats et des décisions prises à Berne. Mais la montagne a plusieurs versants et ses sentiers traversent les frontières.

L’aviation est l’archétype du secteur économique à caractère international et de ce qui en fait un gros frein contre la progression de la protection du climat. Aucun pays ne veut faire le premier pas, de peur d’y être économiquement perdant. Les activistes-alpinistes connaissent l’importance d’une alliance à plus large échelle; les émissions du secteur aérien ne connaissent pas de frontières et ainsi doivent s’organiser leurs actions. Deux expéditions cheminent vers ces objectifs et regroupent des organisations de différents pays: Transport & Environment (voir page 25) et Stay Grounded.

Comme les émissions du secteur aérien, notre action contre ses nuisances ne se limite pas aux frontières.

L’expédition Stay Grounded

Stay Grounded – «Rester sur terre» en français – est un réseau mondial formé en 2016 et riche de la diversité de compétence des plus de 170 organisations qui la composent. On y trouve notamment des associations environnementales, des scientifiques, des syndicats, des groupes locaux d’opposition aux aéroports, ainsi que des organisations soutenant les communautés qui luttent contre des projets de compensation carbone ou de plantations destinées aux agrocarburants.

Au-delà des précieux échanges entre ses membres, Stay Grounded coordonne des actions à portée internationale. C’est ainsi que durant le COVID, l’ATE et des centaines d’autres organisations ont demandé à leur gouvernement de conditionner leur soutien au secteur aérien à des objectifs climatiques clairs. Plus récemment, la pétition «Stop au greenwashing» a été déposée auprès de nombreuses autorités, y compris à Berne. Celle-ci demande aux gouvernements d’arrêter de se fier aux promesses de l’industrie aéronautique et de maintenir le trafic aérien à un niveau compatible avec nos objectifs climatiques.

Le chemin est encore long

De nombreux défis jalonneront encore l’ambitieuse expédition vers un transport aérien plus respectueux de l’environnement et de l’être humain, et les crises que connaît le monde actuellement ne rendront pas l’itinéraire plus praticable. Mais dans nos sacs à dos subsiste un élément essentiel de la collaboration: l’espoir. Lorsqu’une impasse bloque notre progression, on peut parfois entendre un cri de victoire venant d’un autre versant de la montagne. De quoi nous insuffler du courage et nous permettre d’adapter notre chemin.

Yves Chatton - responsable de projets Politique des transports

De précieuses collaborations

Que ce soit dans la région du lac de Constance ou du Léman, à Coire ou à Bâle, les sections de l’ATE doivent répondre aux problèmes de trafic par une action transfrontalière.

Dans le sud du Tessin et la région de Genève, des réseaux performants de RER transfrontaliers ont été mis en place avec le soutien actif de l’ATE. C’est également le cas au nord du pays, où des milliers de pendulaires traversent la frontière entre Bâle-Ville, l’Allemagne et la France. Le tram qui relie Petit-Huningue à Weil am Rhein (D) depuis 2014 est devenu un mode de transport indispensable. «Avec le VCD du district de Lörrach de l’époque, aujourd’hui le VCD-Regionalverband Südbaden, nous avons contribué à faire aboutir ce projet de 100 millions par un travail de persuasion auprès de diverses commissions, de nombreux événements publics et nos communiqués de presse», résume Florian Schreier, directeur de la section ATE de Bâle.

Actuellement, l’ATE bâloise et ses organisations partenaires, l’ADRA française et la BISF allemande, défendent les intérêts des riverains de l’aéroport de Bâle-Mulhouse dans le projet contre-productif «Nouvelle Liaison Ferroviaire» qui doit relier dès 2030 l’EuroAirport à Bâle, Strasbourg et Mulhouse et en augmenter la fréquentation et donc le nombre de vols.

Les sections romandes de l’ATE collaborent de manière intensive avec des organisations des pays voisins dans le but de promouvoir des transports publics transfrontaliers efficaces. Au Jura, la section locale s’engage en faveur de la ligne Bienne-Delle-Belfort par son implication dans un organe de gouvernance transnationale. Remise en service en 2018, la ligne affiche une faible fréquentation principalement due à un cadencement insuffisant et un manque de complémentarité avec le système des transports publics français. L’amélioration du service est pourtant nécessaire pour offrir une alternative attrayante à la voiture.

Des routes encombrées de camions

Au chapitre du transport routier, la section ATE argovienne est entrée en contact avec les Vert·es du Bade-Wurtemberg, car elle s’intéresse au trafic lourd qui, selon les plans allemands, pourrait entrer en Suisse par de nouveaux ponts sur le Rhin. Christian Keller, secrétaire de l’ATE Argovie, critique ces inquiétants corridors de transit pour les 40 tonnes à chaque occasion, comme récemment lors d’un débat public sur le thème des transports publics locaux auquel était invité le ministre allemand des transports Winfried Kretschmann. «Nous voulons intensifier notre collaboration et rassembler les forces progressistes des deux côtés du Rhin», déclare Christian Keller.

«Nous voulons intensifier notre collaboration et rassembler les forces progressistes des deux côtés du Rhin.»

Christian Keller, directeur de la section d'Argovie

À l’époque, le réseau «A13/E43-Netzwerk» s’est consacré à lutter contre les nombreux camions tout en s’engageant pour de meilleures liaisons ferroviaires au bord du lac de Constance et dans la vallée du Rhin. À sa tête a oeuvré Stefan Grass, un activiste de longue date de l’ATE.

Georg Sele, de l’ATE du Liechtenstein (VCL), sait que les spécialistes de la planification routières n’abandonneront pas. L’opposition commune du VCL, du VCÖ Voralberg et des «Grünen/Feldkirch blüht» contre la S18 et le projet Letzetunnel a certes porté ses fruits, mais «le projet suivant, celui du tunnel de Feldkirch, est en construction, le tribunal ayant rejeté notre recours», ajoute-t-il, agacé.

Du côté de Thurgovie, la section locale de l’ATE entretient une étroite coopération transfrontalière dans la région de Kreuzlingen/Constance en soutenant le «Velocityguide» et la bourse aux vélos annuelle. Elle appuie aussi l’«Initiative Bodensee-S-Bahn» qui vise à créer de meilleures connexions ferroviaires, tout autour du lac et avec le réseau de transport à longue distance.

Urs Geiser - rédacteur pour les pages régionales du Magazine ATE

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